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2ème anniversaire de la disparition forcée d’Elie Ngomirakiza : lettre du FOCODE au Président Evariste Ndayishimiye.

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Excellence Monsieur le Président,

Au nom du Forum pour la Conscience et le Développement (FOCODE en sigle) et de sa « Campagne NDONDEZA contre les Disparitions Forcées au Burundi », j’ai l’honneur de vous demander d’user des pouvoirs que vous confèrent la Constitution de la République du Burundi et les autres lois du pays pour ordonner une enquête crédible et sérieuse sur la disparition forcée de Monsieur Elie Ngomirakiza, représentant communal du Congrès National pour la Liberté (principal parti de l’opposition) à Mutimbuzi, enlevé le 09 juillet 2021 près du « Chanic » sur la route Bujumbura – Gatumba.  Cela fait précisément deux ans que ce responsable politique est introuvable, qu’aucune enquête n’est menée, qu’aucune autorité ne s’est exprimée sur le cas, alors que sa disparition a fait objet d’une très grande publicité.

En effet, Excellence Monsieur le Président, les circonstances de l’enlèvement de Monsieur Elie Ngomirakiza ont été clairement évoquées par plusieurs sources dans les heures et les jours qui ont suivi l’incident. Monsieur Ngomirakiza avait passé la journée du 09 juillet 2021 à Maramvya en commune Mutimbuzi, en train d’embarquer dans un camion benne des briques qu’il devait fournir à son client à Kanyosha, au sud de la ville de Bujumbura. Le même jour, aux environs de 16 heures, alors que le camion arrivait près du Chanic sur la route Bujumbura-Gatumba, le camion a été pris en filature par une moto et un pick-up immatriculé A 031. La moto s’est arrêtée devant le camion, forçant ainsi le camion à s’arrêter. Des hommes en uniforme de l’armée burundaise à bord du pick-up ont rapidement fait sortir Monsieur Elie Ngomirakiza du camion et l’ont embarqué dans leur pick-up pour une destination inconnue. Le pick-up a été reconnu par des témoins comme étant le véhicule de fonction du Lieutenant-Colonel Aaron Ndayishimiye (Matricule SS 1793), à l’époque Commandant du 212ème Bataillon déployé dans la Réserve de Rukoko. Un responsable administratif de la zone Maramvya aurait été reconnu parmi les personnes à bord du pick-up. Certaines sources ont rapporté que Monsieur Elie Ngomirakiza aurait été conduit au bureau du renseignement militaire à l’Etat-Major Général de la Force de Défense Nationale du Burundi (FDNB).

Le Parti politique CNL a communiqué publiquement sur cet enlèvement et a saisi des autorités de la police, de l’armée, de la Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme (CNIDH) et de l’administration. Plusieurs médias nationaux et internationaux ont rapporté l’enlèvement et la disparition de Monsieur Elie Ngomirakiza. Curieusement, aucune autorité burundaise ne s’est exprimée sur cette disparition forcée depuis deux ans. Dans la foulée des évènements, le Procureur Général de la République, Monsieur Sylvestre Nyandwi, a animé un point de presse le 28 juillet 2021 pour traiter de « mensongères » les allégations de disparitions forcées diffusées sur les réseaux sociaux. Il a complètement ignoré l’enlèvement de Monsieur Elie Ngomirakiza qui faisait les titres des journaux. Pourtant saisie du cas, la CNIDH n’a jamais évoqué la disparition forcée de Monsieur Elie Ngomirakiza. L’armée, citée dans cet enlèvement d’un civil, n’a même pas communiqué pour laver son blason.

Excellence Monsieur le Président,

Face à ce mur du silence et de l’inaction de toutes les institutions du pays, il n’y a plus que votre autorité pour ordonner une véritable enquête sur la disparition forcée de Monsieur Elie Ngomirakiza. Vos propos du 28 juillet 2022 à Ngozi, propos dans lesquels vous aviez reconnu l’existence des cas d’enlèvements des citoyens commis par des groupes comprenant des agents de sécurité, ainsi votre engagement à combattre les auteurs de ces crimes avaient créé l’espoir de la répression des crimes de disparitions forcées. C’est dans cet espoir que le FOCODE vous a adressé, le 30 août dernier à l’occasion de la journée internationale des victimes de disparitions forcées, une demande d’enquête sur 80 cas de disparitions documentés entre le 18 juin 2020 et le 18 juin 2022. Monsieur Elie Ngomirakiza figure sur cette liste.

Le crime de disparition forcée est un crime grave qui torture et tourmente tout le reste de leur vie les membres des familles des victimes qui ne sauront jamais si les leurs sont encore en vie ou si elles ont été tuées. L’épouse et les huit enfants de Monsieur Elie Ngomirakiza vivent indéfiniment ce calvaire et ce tourment destructeur. Peuvent-ils commencer le deuil ou doivent-ils continuer à espérer le retour du père de la famille ? Bien plus dure est la peur qui enveloppe la famille, incomprise et abandonnée par l’autorité qui devrait la protéger. Ainsi, pour sauver la famille de Monsieur Elie Ngomirakiza de l’emprise de la peur et du désespoir,  il ne reste que votre autorité Monsieur le Président !

Veillez agréer, Excellence Monsieur le Président, l’expression de ma plus haute considération.

                                                                                                                   Pour le FOCODE,

                                                                                                         Sé Pacifique NININAHAZWE

                                                                                                                        Président.

Copie pour Information à :

  • Madame Domine Banyankimbona, Ministre de la Justice et Garde des Sceaux
  • Monsieur Sylvestre Nyandwi, Procureur Général de la République
  • Général Prime Niyongabo, Chef de la Force de Défense du Burundi
  • Monsieur Sixte Vigny Nimuraba, Président de la CNIDH